C’est arrivé en fin d’après-midi dans ma boîte mail, un petit lien dans un message intitulé “pour vous les filles”. L’une de mes collègues arrive dans mon bureau me faisant remarquer que, pour bien finir la journée, c’est idéal. Ca tombe bien, parce qu’à 19h30 j’ai bien besoin d’un bon coup de fouet. Et là: scotchée, je suis, abasourdie, moi la trendsetteuse/modeuse/pro de la communication: enfin la pub fait souffler un vent de folie sur le web! Et pour une fois, je me trouve face à une petite merveille à déguster (des yeux) en réalisant qu’enfin la pub est entrée dans l’ère de la tendance…

Pour vous donner une idée, le mieux est encore d’aller faire un tour sur le lien suivant : http://www.bewareofsideeffects.ca/

Le pitch: une marque de cosméto lance une nouvelle gamme de soins anti-âge baptisée Reversa. Et pour convaincre l’acheteuse lambda de se laisser tenter, pour une fois, on ne lui montre pas en long, en large et en travers les effets positifs que ces produits auront sur sa peau, à grand renfort de schéma explicatifs et études in vivo à l’appui. Non, chez Reversa, on met l’accent sur les effets secondaires… Et quels effets secondaires..!

A première vue, le mini-site tient plus de la blague entre filles que d’une pub destinée à mettre en avant des produits. Habitué(e)s que nous sommes à voir des pubs sans réelle nouveauté, celle-ci a le mérite de créer l’événement. Conçue au Canada, elle s’est exportée partout, transférée par les surfeuses (et les surfeurs, certains de ces messieurs n’ayant pas perdu leur sens de l’humour en route), du bureau à la maison, de la plus jeune à la grand-mère accro au web, de la plus sérieuse à la plus délurée.

C’est ainsi qu’on se rend compte que la France est à la traîne. D’un côté la pub destinée à la “ménagère de moins de 50 ans” qui n’a pas évolué depuis les années 50, de l’autre le sexy-trash de l’ultra-luxe qui mise sur la provoc. Entre les deux, rien, le néant, un vide que nos pubards n’ont pas réussi à combler. Non pas qu’ils n’aient pas les idées (loin de moi l’idée de prétendre que les créatifs manquent d’imagination), mais nos entreprises sont certainement plus frileuses que leurs homologues outre-Atlantique. Car ne vous y trompez pas: les grosses boîtes veulent communiquer moderne, elles demandent de la nouveauté, du fun, du surprenant, mais quand on leur apporte un concept novateur, elles trouvent tous les prétextes du monde pour revenir à la bonne vieille soupe qui nous est servie depuis des décennies. Le progrès n’est définitivement pas passé par-là…
Mais qui se cache donc derrière cette surprenante idée? Il s’agit de l’agence TAXI Montréal. Visiblement, le Québec a décidé de miser sur les nouvelles technologies et compte bien sur le relai Internet. Suivie par Dermtek-Pharmaceutique, la société qui produit Reversa, l’agence a joué la carte de l’humour et du sexy, un décalage savament étudiavec une cible bien affichée: les femmes de plus de 40 ans. Le fil conducteur? Les produits Reversa rendent la peau plus belle, les femmes plus sûres d’elles, et donc plus en phase avec leur sensualité, leur permettant ainsi de séduire de jeunes apollons. et la voix off n’est pas en reste, avec des intonations et soupirs qui ne sont pas sans rappeler des séries roses…

« Reversa tenait à communiquer l’image et la personnalité de sa marque ainsi qu’à souligner les bienfaits qu’éprouvent les femmes qui utilisent ses produits anti-âge, notamment un charme qui les rend plus confiantes et les fait se sentir plus jeunes et plus en maîtrise de leurs moyens », précise Stéphane Charier, directeur de création chez TAXI Montréal. « En fait, le concept s’amuse à inverser les rôles. Cette fois, c’est la femme d’âge mûr qui s’attire les faveurs d’un homme plus jeune. Un charme irrésistible, voilà un avantage intéressant de l’utilisation des produits Reversa. »

La preuve du succès de cette campagne pas ordinaire? Lancée le 5 septembre 2006, ce sont les françaises qui continuent à transmettre l’information aujourd’hui encore. Un exemple que nos pubards devraient enregistrer, et surtout présenter à leurs clients pour tenter de faire évoluer la pub à la française. Honnêtement, qui regarde les graphiques de la peau avant et après utilisation d’une crème anti-âge? Personne? C’est le packaging qui nous attire en premier, pas l’over-information. A vous qui souhaitez séduire la ménagère de moins de 50 ans, sachez qu’aujourd’hui elle en paraît 40, a les préoccupations d’une femme de 30 et l’ouverture d’esprit d’une de 20. A bonne entendeur…

(Un article paru sur Absolute Trendsetter)